MOSTON, Angleterre — Chaque matin, Pat Barrett gravit les marches en béton usées menant au célèbre Collyhurst and Moston Gym, situé au-dessus d’une supérette en périphérie du centre-ville de Manchester.

Cette salle de boxe est la maison de Barrett depuis près de 40 ans. En tant que boxeur, il était un puncher redoutable, dont la puissance effrayante lui a permis de remporter les titres britannique et européen des super-légers, avant d’obtenir une chance mondiale.

Comme entraîneur, il a connu un succès similaire. Depuis qu’il a repris la salle lorsque son mentor Brian Hughes MBE a dû prendre sa retraite, Barrett a guidé son neveu Zelfa Barrett et son cousin Lyndon Arthur jusqu’au plus haut niveau, tout en les éloignant des dangers et des tentations de la rue, omniprésents dans les quartiers entourant la salle.

Le gymnase abrite également le siège de Black Flash Promotions, la société de promotion fondée par Barrett il y a plus de dix ans. Désormais, il passe presque autant de temps dans son bureau qu’à arpenter la salle d’entraînement ou à s’appuyer sur les cordes pour observer les séances de sparring.

Accrochée au mur derrière lui se trouve la magnifique ceinture européenne bleue et or qu’il avait remportée en mettant Efren Calamati KO en 1990.

Ce samedi soir, Lyndon Arthur (24-3, 16 K.-O.) disputera à son tour un combat pour le titre européen, face au nouveau champion Brad Rea (21-1, 10 K.-O.).

L’affiche entre Arthur, fan de Manchester United, et Rea, supporter de Manchester City, est considérée comme le plus grand derby mancunien depuis plus de dix ans. Le combat aura lieu à la Co-op Live Arena et sera diffusé dans le monde entier sur DAZN.

Barrett endossera son rôle d’entraîneur ce week-end, mais le promoteur en lui est tout aussi enthousiaste.

« Brad Rea est champion, il a gagné le titre européen mais il n’a jamais vécu ce genre de situations auparavant. Pour lui, goûter à ce niveau, il ne va pas le lâcher, n’est-ce pas ? » a confié Barrett à The Ring.

« Il veut les grands combats. Il dit : “C’est mon tour maintenant. Tu as eu le tien, Lyndon.” »

« Quand j’ai vu Brad remporter ce titre européen, la première chose que j’ai faite le lendemain, c’est d’appeler Steve Wood [le manager de Rea]. Je lui ai dit : “Qu’est-ce qu’on peut faire avec ça, Steve ? Ce serait le meilleur derby de Manchester depuis Anthony Crolla – John Murray.”*

« J’ai même ajouté que ce serait encore mieux, parce que c’est Manchester City contre Manchester United. Un vrai derby. Le lendemain, tout le monde en parlait et jouait sur cette rivalité footballistique. J’ai posté ça sur X et ça a explosé. C’est un grand combat, parfait pour Lyndon, car il s’agit d’un titre européen et d’une opportunité unique pour Brad. »

En avril dernier, Arthur a perdu son troisième affrontement contre Anthony Yarde.

Durant sept rounds, Arthur a très bien boxé — il se déplaçait, utilisait son excellent jab, celui-là même qui avait tant perturbé Yarde lors de leur premier duel, et plaçait aussi sa redoutable droite, souvent sous-estimée.

Souhaitant prouver quelque chose après avoir été arrêté lors de la revanche, il a ensuite choisi de se battre davantage, se retrouvant plus souvent dos aux cordes — un terrain favorable à Yarde. Le Londonien a finalement obtenu une victoire unanime difficile mais méritée, concluant ainsi leur trilogie.

Yarde et le champion unifié des poids mi-lourds du Ring Magazine, Dmitry Bivol, sont les seuls hommes à avoir battu Lyndon Arthur depuis le début de sa carrière professionnelle en 2016. Mais, à 34 ans, beaucoup se demandaient s’il aurait encore la motivation de redescendre d’un cran pour se reconstruire et repartir à l’assaut du sommet.

L’émergence de Brad Rea comme champion d’Europe a ouvert une porte inattendue pour Arthur — mais Pat Barrett n’a jamais douté de la détermination de son boxeur.

« Écoute, s’il ne voulait pas tout recommencer, je ne serais pas là avec lui, » a-t-il assuré. « Bien sûr qu’il le veut.

On sait ce que ça demande, ce qu’il faut faire pour revenir au plus haut niveau. Mais ce combat ne nous y ramène pas encore. Il faut gagner — lui comme nous. Il y a beaucoup en jeu pour les deux. »

Barrett mesure parfaitement l’importance de ce rendez-vous.

Arthur a évolué à un niveau bien plus relevé que Rea, mais le plus jeune arrive avec une grande confiance et dans la forme de sa vie.

Il y a presque trois ans jour pour jour, Rea avait été écarté brutalement après sa défaite lors du championnat d’Angleterre des poids moyens contre Tyler Denny. Contraint de repartir de zéro dans les petites salles, le boxeur de 27 ans est resté discipliné, a laissé son gabarit d’1m93 (6 pieds 4) s’adapter à la catégorie des 175 livres (mi-lourds), et a refait surface en juin dernier en battant Shakan Pitters pour s’emparer du titre européen.

Désormais sous contrat promotionnel avec Queensberry, Rea sait qu’une victoire contre un boxeur établi et reconnu comme Arthur pourrait propulser sa carrière à un tout autre niveau.

Barrett, lui, sait exactement à quoi s’attendre. Arthur et Rea se sont déjà affrontés à l’entraînement, mais plutôt que de se focaliser sur les forces ou les faiblesses de son adversaire, Barrett préfère s’assurer que son boxeur soit dans la meilleure forme possible.

« Peu importe le niveau de l’adversaire ou d’où il vient. Ce qui compte, c’est de le respecter, point final, » a-t-il conclu.

« Respecte ton adversaire. Il faut respecter ses ennemis, même si on ne les aime pas, parce qu’ils sont dangereux. Respecte ton opposant, parce que c’est lui le champion.

Si tu ne le respectes pas et que tu ne te prépares pas correctement, tu te feras battre par quelqu’un que tout le monde considère comme moyen. Sous ma supervision, ça n’existe pas. Peu importe ce que les gens peuvent dire.

C’est lui qui est champion, pas nous. Nous sommes les challengers. Peu importe le niveau auquel on a déjà boxé, ce combat est d’un tout autre ordre."